Le discours d’Emmanuel Macron lors de la Conférence des ambassadeurs français à Paris suscite une réflexion sur la relation complexe entre la France et l’Afrique. En particulier, les récentes évolutions concernant l’armée française sur le continent africain révèlent un malaise profond, autant du côté de l’exécutif français que des pays africains. Les bases militaires françaises, qui symbolisent pour beaucoup l’ancienne domination coloniale, deviennent un point de friction croissant pour les jeunes générations africaines. Ces bases, vestiges d’un passé colonial, sont perçues comme des symboles de l’occupation persistante de pays africains qui ont pourtant obtenu leur indépendance. C’est ainsi que le discours de Macron, bien qu’il semble plaider pour une nouvelle approche de l’Afrique, semble aussi trahir une nostalgie de l’époque où la France exerçait une influence quasi-hégémonique sur le continent.

L’une des caractéristiques notables du discours présidentiel est cette tension entre la volonté de maintenir des liens forts avec l’Afrique et la réalité sur le terrain. La jeunesse africaine, plus éduquée et plus consciente des enjeux géopolitiques mondiaux, est de plus en plus exigeante vis-à-vis de la France. L’attachement à la souveraineté et à l’indépendance de leurs pays pousse ces jeunes, souvent représentés par de nouveaux dirigeants comme ceux du Burkina Faso, du Sénégal ou du Tchad, à rejeter une relation post-coloniale qui semble encore marquée par des relations de dépendance et d’influence extérieure. Le rejet de cette tutelle s’incarne dans les critiques virulentes contre la politique française et les interventions militaires, qui sont perçues comme des ingérences dans les affaires intérieures des pays africains. Ces critiques s’étayent sur un héritage douloureux, celui d’une histoire marquée par des luttes pour l’indépendance et des résistances à l’influence coloniale. Certains dirigeants africains, ayant osé défier l’ordre établi par l’ancienne puissance colonisatrice, ont payé un prix élevé. On pense à des figures comme Sylvanus Olympio au Togo, Thomas Sankara au Burkina Faso pour ne citer que ceux-là, qui ont tenté de résister à l’hégémonie française et ont vu leur vie et leur carrière brisées par des coups d’État, souvent soutenus en sous-main par des intérêts français. L’héritage de la conférence de Berlin de 1884-1885, qui a partagé l’Afrique entre les puissances coloniales européennes, reste une plaie béante dans la conscience collective des peuples africains. La France, comme d’autres nations colonisatrices, a façonné l’Afrique à son image, imposant des frontières artificielles et une domination économique et politique qui ont conduit à des décennies d’exploitation. En effet, la « civilisation » vantée par la France n’a jamais été qu’un prétexte pour la spoliation des ressources africaines et l’imposition d’un modèle économique qui a souvent desservi les intérêts des peuples du continent. Dans ce contexte, il semble que la France soit prise dans un dilemme : comment continuer à défendre ses intérêts en Afrique sans nourrir la rancœur des nouvelles générations, qui aspirent à un avenir de souveraineté et d’égalité ? La nostalgie de l’ère coloniale, qui transparaît dans certaines déclarations de Macron, est-elle réellement compatible avec les aspirations de l’Afrique moderne ? Alors que le continent africain se redéfinit à travers ses jeunes leaders et sa quête de stabilité et de développement, la France doit reconsidérer son rôle et ses relations avec ces pays qui cherchent à se libérer de l’ombre du passé colonial. En somme, Emmanuel Macron, malgré ses efforts pour réinventer la politique africaine de la France, semble être confronté à la réalité d’un continent en pleine évolution, où l’ancienne puissance coloniale peine à maintenir son influence. Le discours présidentiel laisse entrevoir la difficulté d’accepter une rupture nette avec les pratiques du passé, tout en devant répondre aux attentes d’une jeunesse africaine de plus en plus impatiente de se débarrasser des chaînes d’une histoire encore trop présente.

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