Dans le cadre de la lutte contre les violences sexuelles au Sénégal, l’Association des Juristes Sénégalaises (AJS), en partenariat avec l’AWDF (African Women’s Development Fund), mène des actions décisives pour sensibiliser et informer les communautés. Lors d’un atelier organisé ce mardi à Dakar, Ndeye Coumba Gueye secrétaire exécutif de l’AJS, a partagé les efforts de l’association pour combattre ce fléau.
« L’AJS participe activement à des activités communautaires aux côtés des acteurs religieux, des jeunes et des acteurs de la chaîne judiciaire », a expliqué Mme Gueye. « AJS participe à cette rencontre avec AWDF qui est un de nos partenaires. Ils nous financent pour la vulgarisation, la sensibilisation et la lutte contre les violences sexuelles. Nous avons fait beaucoup d’activités au niveau communautaire avec les acteurs religieux, avec les jeunes et autres. Et nous avons aussi fait d’autres activités avec les acteurs de la chaîne judiciaire pour que les populations puissent s’approprier de cette loi criminalisant le viol et la pédophilie ». a t-elle ajouté. Depuis le début de leur financement, actuellement dans sa deuxième phase, l’AJS a développé plusieurs initiatives pour sensibiliser et éduquer sur ces questions cruciales.
Malgré les efforts, le taux de violence reste préoccupant au Sénégal. En effet, le taux de violence sexuelle s’élève à 21,5 %. « Derrière ces chiffres, se cache une réalité encore plus sombre », a averti la secrétaire exécutif de l’AJS. Poursuivant, elle a ajouté que « de nombreux cas ne sont jamais dénoncés, en particulier ceux qui se déroulent au sein des familles. Ce manque de dénonciation fausse l’ampleur réelle des violences sexuelles dans notre pays. Entre janvier et juin 2024, les boutiques de droits de l’AJS ont reçu 2550 cas de consultations juridiques, sur les 500 cas de violences 196 constituent de cas de viols. Ces chiffres révèlent une augmentation significative des signalements, mais ils demeurent loin de refléter la réalité. »
Ndeye Coumba Gueye a souligné aussi l’importance d’un fonds d’assistance pour les victimes de violences sexuelles. Elle a indiqué que celles-ci ont besoin d’une prise en charge médicale et psychologique complète. Un autre défi majeur est la formation des enquêteurs. « Les officiers de police judiciaire ne sont pas toujours suffisamment formés pour mener des enquêtes sensibles sur les violences sexuelles », a-t-elle plaidé. Elle plaide pour un renforcement des capacités des enquêteurs afin de mieux accompagner les victimes et de mener des investigations rigoureuses.
Pour encourager les victimes à briser le silence, l’AJS milite pour la mise en place de lois protégeant les lanceurs d’alerte, permettant des dénonciations anonymes et sécurisées. « La société civile est en train de mettre en place une loi sur les lanceurs d’alerte. Donc ce sera l’occasion de mettre un focus sur les violences sexuelles. Peut-être que les gens ne savent pas, on peut dénoncer anonymement, on peut dénoncer des cas sans être inquiétés. Mais c’est dans les familles en général que ça se passe. Et quand ça se passe dans les familles, si c’est un proche-parent, si c’est un non-coupé, un voisin, de peur que la famille se disloque, ces violences-là ne sont pas du tout à dénoncer », a précisé la secrétaire exécutif de l’AJS.
S’inspirant de modèles internationaux, cette dernière propose la création de structures de prise en charge intégrée où les victimes recevraient, en un seul lieu, une assistance médicale, psychologique, et juridique. « Des pays comme la Corée du Sud ont mis en place des centres uniques pour la prise en charge complète des victimes, et cela a donné de bons résultats », conclut-elle.
L’AJS en partenariat avec AWDF continue de mener des plaidoyers pour l’amélioration des mécanismes de protection des victimes de violences sexuelles au Sénégal, espérant un changement durable grâce à l’engagement des autorités et de la société civile.